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Les produits du bois canadiens percent un marché en expansion en Inde

Lors du mariage d’un membre de sa famille en Inde en 1986, Tom Sundher a fait une découverte qui allait changer le sort de son entreprise de bois d’œuvre de la Colombie‑Britannique et celui de toute l’industrie canadienne des produits forestiers.

« Partout où je suis allé, j’ai vu du bois, beaucoup de bois, mais pas de bois canadien », se souvient-il. « Notre bois est utilisé partout dans le monde », ai‑je pensé, « alors pourquoi ne l’est‑il pas en Inde? »

M. Sundher, fondateur et propriétaire du Sundher Group of Companies, qui comprend trois entreprises fabriquant et commercialisant différents types de produits forestiers côtiers pour les marchés canadiens et mondiaux, a décidé d’agir. Aujourd’hui, son entreprise enregistre en Inde environ 10 % de ses 50 millions de dollars de ventes annuelles de bois d’œuvre. Ce bois d’œuvre y est transformé en cadres de portes et de fenêtres, ainsi qu’en portes, en revêtements de sol, en panneaux et en meubles.

« Notre marché en Inde croît chaque année », déclare M. Sundher, président-directeur général de l’entreprise, qui souligne que 60 % de ses revenus proviennent de l’extérieur de l’Amérique du Nord. Il est un ardent promoteur non seulement de la commercialisation du bois d’œuvre de la Colombie-Britannique dans le monde, mais aussi de l’ouverture de marchés nouveaux et émergents. Cependant, pendant les premières années, les exportations de bois canadien vers les États-Unis, le Japon et l’Europe par exemple étaient en plein essor, et il ne pouvait pas générer assez d’enthousiasme pour s’attaquer au marché indien.

Tom Sundher
Tom Sundher, président‑directeur général de Sundher Group
(Photo : Ron Sen)

« Nous sommes gâtés et un peu paresseux », explique-t-il. « Personne ne s’intéressait à la question. » « Nous avons d’autres plans », ont‑ils dit.

M. Sundher a participé seul à une foire commerciale en Inde en 1998 à titre d’agent de MacMillan Bloedel, l’ancienne société forestière canadienne, avec l’appui de Viney Gupta, membre du Service des délégués commerciaux (SDC) du Canada à New Delhi. « Viney m’a aidé à monter un kiosque avec quelques exemples de bois de la Colombie-Britannique. C’était simple, croyez-moi », dit-il, en faisant remarquer que M. Gupta a continué d’appuyer ses tournées de présentation pour promouvoir le bois canadien.

Les efforts de M. Sundher se sont multipliés au fil du temps et, en 2012, la province a créé une direction internationale de son agence de commercialisation, Forestry Innovation Investment Ltd. (FII), qui travaille avec l’industrie et le gouvernement fédéral pour aider à maintenir, à créer et à diversifier les marchés pour les produits forestiers de la Colombie-Britannique. La société d’État a désigné les produits de boiserie d’intérieur, les meubles, les portes et les fenêtres comme un secteur sur lequel la Colombie-Britannique pourrait se concentrer et où la province pourrait devenir active dans des pays comme l’Inde. Aujourd’hui, de nombreuses entreprises y font la promotion de leurs produits de bois d’œuvre, affirme M. Sundher, bien que la part de marché du Canada dans ce marché hautement concurrentiel soit toujours inférieure à 1 %.

« Ce pourcentage ne peut que monter », dit‑il, soulignant que le bois d’œuvre canadien est à la fois plus facile à utiliser et concurrentiel sur le plan des coûts. M. Sundher voit la demande du marché indien croître, comme l’Inde est le deuxième pays en importance au monde et l’un des plus jeunes. L’Inde est de moins en moins approvisionnée en bois dur par ses fournisseurs habituels et le pays est à la recherche d’essences de remplacement, alors que les marchés traditionnels pour le Canada, comme le Japon, les États‑Unis et l’Europe, sont également en déclin, explique‑t‑il.

David Fisher, vice‑président du marketing international pour FII, affirme que la stratégie de marketing de l’organisation en Inde comprend l’éducation des publics cibles au moyen d’essais de produits et de démonstrations qui présentent l’utilisation des essences de bois de la Colombie-Britannique à des fins commerciales.

Il affirme que les essences de bois dur côtier de la Colombie-Britannique, soit le cèdre jaune, le cèdre rouge de l’Ouest, la pruche de l’Ouest, ainsi que le sapin de Douglas, sont des exportations idéales vers l’Inde pour la fabrication de produits qui nécessitent du bois clair sans nœud, comme pour des fenêtres, des portes et des meubles. Des essences de bois d’œuvre comme l’épinette et le pin y trouvent également un marché. L’Inde ne représente qu’un faible pourcentage des exportations de la Colombie-Britannique, mais sa stabilité croissante et sa forte économie la rendent de plus en plus attrayante.

« L’Inde est un pays où les relations ont une grande importance », fait remarquer M. Fisher, insinuant que les entreprises doivent être patientes et travailler fort pour accroître leur clientèle dans ce pays, lequel devrait être confronté à une grave pénurie de bois au cours des 16 prochaines années. « Ce pays pourrait devenir un marché important pour nous. »

M. Sundher conseille aux entreprises comme la sienne de « se concentrer sur ce dont les Indiens ont besoin », comme le bois d’œuvre pour les fenêtres, les portes et les meubles de tailles précises. Il est également important d’être présent sur le terrain et d’avoir des ressortissants indiens au sein de son personnel. Son entreprise a ouvert un bureau de vente à Ahmedabad, en Inde, il y a trois ans, et elle représente d’autres entreprises forestières au pays.

Chaque année, FII parraine un kiosque de promotion du bois du Canada dans le cadre d’une grande foire commerciale indienne, ce que M. Sundher trouve gratifiant.

« Lorsque j’ai commencé, personne ne parlait même de l’Inde », dit-il, en mentionnant que l’importance croissante accordée au pays « est bonne pour l’économie canadienne et l’industrie canadienne du bois d’œuvre. Il y a de la place pour tout le monde; plus on est de fous, plus on rit! »

M. Sundher reste en contact avec le délégué commercial Viney Gupta, qui s’occupe de la foresterie ainsi que de l’aérospatiale, de la défense et de la sécurité, pour obtenir de l’aide afin de cerner de nouvelles perspectives et de contribuer à façonner davantage l’entreprise.

« Je discute toujours avec Viney pour obtenir son opinion », dit‑il, en faisant remarquer que, dernièrement, il a aussi beaucoup compté sur FII pour la plus grande partie de l’aide dont il a besoin au quotidian.

Les deux fils de M. Sundher travaillent au sein de l’entreprise et font preuve de dévouement pour développer des marchés étrangers comme celui de l’Inde. Le Sundher Group y a réalisé des ventes d’environ un demi‑million de dollars en 2014, comparativement à 4 millions de dollars en 2018; il espère faire des affaires d’une valeur de 10 millions de dollars en Inde d’ici 2020.

L’exportation de bois d’œuvre vers un marché éloigné comme celui de l’Inde « n’est pas une tâche facile; il faut avoir les choses bien en main », dit M. Sundher, conseillant aux entreprises de choisir leurs clients de façon sélective. De leur côté, les Indiens sont « impressionnés par le Canada, par notre mode de vie, notre façon d’interagir avec les gens, et l’accueil que nous recevons partout dans le monde. Notre bois est bien accepté. »

M. Sundher est d’avis que les entreprises de bois d’œuvre canadiennes « devraient constamment chercher de nouveaux marchés pour leurs produits », en particulier un plus grand nombre de produits finis qui conservent plus d’emplois au Canada. En effet, sa propre entreprise compte 12 employés, mais elle procure un emploi à 100 Canadiens, par exemple dans les scieries, les séchoirs, et le domaine de l’expédition et du suivi.

Il dit que les entreprises canadiennes de bois d’œuvre devraient être encouragées par leurs récents succès en Inde. « Nous venons tout juste de commencer. Ce n’est pas la fin; c’est le début de l’histoire, à mon avis. »

Le potentiel important qu’offre le bois d’œuvre canadien

L’Inde est l’un des cinq plus grands marchés mondiaux pour le bois et les produits du bois, et elle représente un potentiel important pour le secteur canadien des produits forestiers et de la construction, affirme Viney Gupta, délégué commercial qui s’occupe du secteur forestier au sein du Service des délégués commerciaux (SDC) du Canada à New Delhi.

D’ici 2024, l’Inde sera le pays le plus peuplé du monde et aura besoin d’énormes volumes de bois pour répondre à ses besoins de base en matière de logement, de construction et de production de meubles, dit‑il. Le pays dépend aussi en grande partie des importations de bois d’œuvre en raison d’une décision de la Cour suprême interdisant la coupe d’arbres dans bon nombre de ses forêts.

Selon M. Gupta, alors que les ventes de bois d’œuvre canadien à l’Inde ont décuplé au cours de la dernière décennie, « elles représentent toujours moins de 1 % des importations totales de bois d’œuvre de l’Inde ». Les exportations canadiennes de bois d’œuvre vers l’Inde en 2017–2018 étaient évaluées à 2,4 milliards de dollars.

« Le Canada est encore un jeune joueur sur le marché indien du bois et des produits du bois », affirme M. Gupta. Il y a eu des progrès, par exemple grâce à Forestry Innovation Investment (FII) de la Colombie‑Britannique, qui a établi un bureau à Mumbai en 2012. « L’équipe du SDC en Inde continue de travailler en étroite collaboration avec FII pour promouvoir l’utilisation de certaines espèces de bois auprès des principaux influenceurs locaux », dit‑il, en faisant remarquer qu’il existe une collaboration similaire entre le SDC et d’autres partenaires provinciaux, soit Ontario Wood et le Bureau de promotion des produits forestiers du Québec.

Le Nord de l’Inde continue d’être un grand importateur de bois de résineux et de certains bois de feuillus, mentionne M. Gupta, tandis que les acheteurs de l’Ouest et du Sud de l’Inde préfèrent les espèces côtières. « L’Inde est principalement un marché de bois dur, où le teck est considéré comme la norme de référence en matière de résistance contre la décomposition et les termites », explique‑t‑il. Le Canada possède un fort potentiel sur le marché local, grâce aux essences de bois dur comparables en provenance de l’Ontario et du Québec.

Parmi les défis continus que doivent relever les exportateurs de bois d’œuvre ici, mentionnons les fluctuations des prix et l’absence de distributeurs sur le terrain pour les produits canadiens, ajoute M. Gupta.


Publication initiale : 2019

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