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Ouvrir la voie comme première femme déléguée commerciale du Canada

Patricia Marsden‑Dole avait depuis longtemps attrapé la piqûre du voyage avant de postuler pour un poste au Service extérieur du Canada en début 1969.

La femme native de Vancouver, qui avait déjà étudié à l’étranger au Collège d’Europe à Bruges, en Belgique, et qui habitait alors à Londres, a passé l’examen du Service extérieur là‑bas, principalement pour apaiser sa famille. Ils connaissaient son sens de la découverte, mais voulaient qu’elle renoue avec ses racines au Canada. Ils ont donc pensé qu’un poste de représentante du pays au niveau international permettrait de concilier ces deux aspirations.

Une époque de changement social

À cette époque, cependant, de nombreuses professions de ce type n’étaient pas entièrement accessibles aux femmes. « Vous pouviez être infirmière, bibliothécaire ou enseignante », se souvient Mme Marsden‑Dole, aujourd’hui âgée de 75 ans.

Elle n’était même pas certaine de vouloir devenir diplomate, « mais, affirme‑t‑elle, je n’avais aucune intention de retourner vivre au Canada ». Mme Marsden‑Dole a également déclaré lors de l’entrevue qui a suivi l’examen qu’elle voulait travailler au Service des délégués commerciaux (SDC) du Canada, parce qu’on lui avait dit lors d’une séance de recrutement en 1967, lorsqu’elle étudiait à l’université de la Colombie‑Britannique, qu’ils n’acceptaient pas les femmes.

Patricia Marsden-Dole
Patricia Marsden‑Dole en 1992

Une transformation majeure s’annonçait cependant pour Mme Marsden‑Dole, pour le SCD, ainsi que pour le pays en entier. « Il s’agissait d’une période de changement au Canada — de changement social ».

La Commission royale d’enquête sur la situation de la femme au Canada tenait des audiences publiques qui ont mis en lumière les problèmes d’inégalité généralisée auxquels les femmes étaient confrontées. Selon Mme Marsden‑Dole, cela a incité le gouvernement à leur ouvrir des postes dans certaines filières de la fonction publique, notamment le commerce.

Pionnière

Elle a ainsi obtenu le poste et s’est jointe au SDC en août 1969 sur les conseils de son futur mari, qui lui a suggéré de tenter le coup. La première année de son équipe de nouvelles recrues a été consacrée à visiter des entreprises, petites et grandes, de tout le pays, afin de connaître leurs besoins et leurs attentes en qualité d’exportateurs. « C’était vraiment du concret; nous avions, en effet, affaire à nos futurs clients », se souvient Mme Marsden‑Dole, qui avait étudié les sciences politiques, l’économie et l’histoire industrielle/économique. Elle a rapidement saisi l’importance du travail qui l’attendait à titre de déléguée commerciale et s’en est réjouie. « J’étais émotionnellement et intellectuellement engagée dans la nécessité de conserver les emplois au Canada. »

Cependant, en tant que femme pionnière dans ce rôle, elle ne se sentait pas vraiment membre à part entière de l’équipe. « J’éprouvais le sentiment d’être de trop. Ils ne pensaient tout simplement pas que les femmes pouvaient — ou devaient — occuper un tel poste. »

Le réseau du SDC d’aujourd’hui

Au cours des 125 dernières années, notre lieu de travail a évolué pour devenir plus inclusif. L’une des plus grandes forces du réseau du SDC est la diversité. Aujourd’hui, plus de la moitié des 1 000 délégués commerciaux du Canada sont des femmes. Avec des bureaux dans plus de 160 villes à travers le monde, le SDC peut vous fournir des aperçus sur le marché et vous connecter avec un réseau de contacts inégalable.

Les rotations associées à son emploi ont définitivement satisfait sa soif de voyage. En effet, sa première affectation en 1970, à l’âge de 24 ans, était à New Delhi, « ce qui équivalait à être parachutée dans la Terre du Milieu, étant donné qu’il s’agissait d’une culture entièrement différente », explique‑t‑elle. C’était également difficile de travailler au sein d’un service considéré comme le service d’un homme. « On m’a envoyée à Delhi pour prouver que les femmes ne pouvaient pas être déléguées commerciales », commente‑t‑elle. « Personne ne savait quoi faire de moi, et ils espéraient que j’abandonnerais et que je rentrerais au pays. »

Mme Marsden‑Dole se sentait seule et frustrée, mais elle s’est rapidement mise à vendre des machines agricoles, de l’équipement d’avions et de défense « et tout ce qui lui permettait d’explorer le patrimoine de l’Inde britannique en voie de disparition ». Elle se souvient par exemple de la demande d’Indian Airlines pour des sièges d’avion et celle des agriculteurs du Pendjab pour de l’équipement agricole afin d’alimenter la passionnante « révolution verte » du pays. « J’aimais y aller parce que je parvenais ainsi à m’éloigner du bureau. »

Des affectations dans diverses parties du Service extérieur et dans différentes missions éloignées ont suivi, notamment au Royaume‑Uni, en Australie, aux États‑Unis (à Cleveland, en Ohio), à New Delhi (de nouveau), en Tanzanie et au Portugal (en tant que chef de mission dans ces deux derniers pays).

« Ma vision du monde s’est donc élargie », dit Mme Marsden‑Dole, qui est fière de ses nombreuses réalisations en cours de route. En Australie, par exemple, elle a réussi à vendre des machines agricoles pour les terres arides, dont le Canada est le spécialiste, à des agriculteurs frappés par la sécheresse. « Nous avons réussi à conclure de nombreux accords », se réjouit‑elle.

De retour au pays – continuer à avoir une incidence

« J’ai senti que je faisais quelque chose d’important et d’utile pour l’indépendance économique du Canada, » affirme Mme Marsden‑Dole, en plus d’améliorer les relations entre le Canada et les pays où elle a œuvré. Elle a notamment été ambassadrice du Canada au Portugal de 1994 à 1998, à l’époque des controversées « guerres du poisson » de l’Atlantique Nord, en plus de faire partie d’un projet visant à réunir des familles de pêcheurs de Terre‑Neuve et du Portugal. Ils ont navigué entre les deux pays à bord d’un quatre‑mâts traditionnel portugais, une initiative de l’Année internationale de la mer en 1998. Mme Marsden‑Dole, qui compte des ancêtres terre‑neuviens, a trouvé l’expérience « très importante ».

Lorsqu’elle représentait le Canada à l’étranger, ses homologues étaient toujours des hommes. « Plus tard dans ma carrière, j’ai découvert le plaisir de travailler dans le domaine de la politique commerciale au pays. » Elle a pris sa retraite en 2003, a obtenu un doctorat en théologie appliquée et est devenue une militante communautaire bénévole et une porte‑parole des enjeux touchant les personnes âgées.

Mme Marsden‑Dole est fière d’avoir ouvert la voie au sein du SDC, où elle a montré que les femmes étaient effectivement à la hauteur, « même en qualité de mères de jeunes familles ». Elle estime que les délégués commerciaux, hommes et femmes, font un travail essentiel qui profite au pays.

« Ce qu’il faut surtout, c’est avoir un sens naturel de ce qui fait tourner l’économie où que l’on soit et d’y voir la place que pourrait y occuper le Canada », ajoute‑t‑elle. « Quand on parvient à rapprocher un fournisseur canadien d’un acheteur étranger, qu’on soit un homme ou une femme importe peu. »

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